mercredi 5 octobre 2016

Night Call


« 4 Blu-Ray pour 30€ », c’est alléchant mais il faut faire une sélection parmi le relativement maigre choix que propose les Leclerc ou Cora, entre ce qu’on voulait absolument « régulariser », ce qu’on a pas vu et qu’on est au minimum curieux de voir, ou ce qu’on va choisir par défaut pour en avoir 4 au passage en caisse. En plus de Kingsman : Services Secrets et Mission Impossible 5 : Rogue Nation (que j’avais vu en salles, lui), j’ai du opter pour Exodus : Gods And Kings par défaut… (c’était ça ou Le Septième Fils, au milieu de trucs comme Terminator Genisys ou Hitman : Agent 47 que je n’avais pas spécialement envie de revoir en BR, et bien sûr d’autres merdes), en revanche j’ai pris en pleine connaissance de cause Night Call. Et tant pis si ce soir au moment où je publie cet article, il passe pour la première fois sur OCS… J’en ai entendu beaucoup de bien et je suis enthousiaste à l’idée de tomber sur un bon Thriller nocturne bien tendu dans le monde du journalisme sans limites. Film relativement indépendant (produit par Orange Cinéma, ce qui explique l’exclu sur OCS…), il est réalisé par Dan Gilroy, scénariste frère de Tony Gilroy (réalisateur de Jason Bourne : L’Héritage), car comme toujours le cinéma c’est une affaire de famille… Dan signe ici son premier film et cède à l’appel de la nuit.

Louis ou « Lou » (Jake Gyllenhaal), un homme lunatique, gagne sa vie en volant des métaux à Los Angeles. Négociateur difficile, il veut toujours plus. Un soir, il assiste à un accident sur l’autoroute et rencontre des reporters sur les lieux, qui grâce à leur maîtrise arrivent avant la police sur des accidents ou des lieux de crime. Il s’intéresse à leur métier et décide de partir lui aussi en chasse d’images choc. Maladroit au début, Louis est persévérant et finit par vendre ses premières images à Nina (Rene Russo), d’une petite chaîne californienne, convaincue par ses talents naissants. Louis décide de ne pas s’arrêter là, embauche un associé (Riz Ahmed), et grâce à son intarissable soif d’apprendre, améliore le nombre et la qualité de ses reportages. Mais à force d’ambition, Lou va finir par aller toujours plus loin dans ses négociations et manipulations et courir des risques insensés…


Il n’y a pas vraiment de surprise. Night Call est bien un thriller qui se déroule dans un environnement majoritairement nocturne, suivant les pérégrinations d’un néo-reporter prêt à tout pour avoir les images les plus choquantes avant tout le monde. De ce côté, Night Call ne révolutionne rien et se base sur un scénario dès plus simples. Avec bien sûr une critique sous-jacente de l’info « pute à audience » mais qui n’est pas si grossière et si développée que ça. Night Call surprend assez car ce n’est donc pas un pamphlet absolu contre l’information scandale en mode « l’Amérique a peur », la critique est forcément présente mais ne va pas chercher plus loin que ce qui a déjà été fait pour le genre. Forcément Thriller, Night Call n’est pas non plus un film de crime ou même policier. Les crimes et autres évènements dépeints sont très secondaires et ne servent que d’alibi pour le vrai sujet du film. Il n’y a pas de ramifications tordues à attendre de ce point de vue, seul un évènement précis servira de base pour la dernière et plus remarquable partie du film. Car le vrai sujet du film, c’est bien son personnage principal, Lou Bloom, campé par Jake Gyllenhaal.

Lou est fou, complètement et terriblement fou. Perfectionniste, baratineur, tyran, mégalo, et même psychopathe. Flippant dès ses premiers dialogues, le personnage est l’attraction principale de Night Call, et subjugue ce film sur l’information assez banal en apparence. Sorte de cas social extrêmement intelligent qui applique à la lettre ses principes préétablis, Lou est campé par un Jake Gyllenhaal qui, soyons honnêtes, livre une performance historique. Les yeux globuleux, le rictus premier degré, la coiffure lisse, l’acteur américain est habité par un personnage qui semble parfaitement correspondre à l’interprète de Donnie Darko, qui n’avait d’ailleurs pas vraiment livré un tel rôle de composition depuis. Night Call est donc avant tout un film sur le personnage de Lou Bloom, son comportement, ses actions, la façon dont il manipule habilement son entourage, comme la productrice Nina (campée par Rene Russo) et son « assistant » Rick (Riz Ahmed), souffre-douleur en puissance qui donne encore plus d’impact au côté tyrannique et sans pitié du personnage. Night Call est volé par son personnage fou à lier et inoubliable, effrayant et attachant à la fois, et l’œuvre de Dan Gilroy n’aurait pas eu grand intérêt si Gyllenhaal ne s’était pas glissé dans ce costume avec une interprétation purement exceptionnelle.


Servi par une réalisation très « californienne » qui met bien en valeur le côté chic de Los Angeles, une savante utilisation des plans fixes (la caméra ne bouge vraiment que lors des scènes d’« investigation », ce qui nous donne un splendide côté immersif) et une bonne musique électro, Night Call réussit habilement son coup avec sa plus-value absolue qu’est le personnage atypique et corrosif de Lou, campé par un Jake Gyllenhaal au sommet de son art. Dommage que l’ensemble manque finalement d’un peu de noirceur, qui finit néanmoins par exploser à la fin, de manière peut-être un peu prévisible d’ailleurs. S’il ne creuse pas vraiment son côté critique de l’info « Breaking News » et qu’il ne choisit pas de nous embarquer dans une affaire policière tordue (ce qui aurait néanmoins pu marcher), Night Call est tout de même un très bon thriller (servi par des scènes bien tendues) mais, il faut encore le dire, est servi à 99% par son personnage principal totalement cinglé, au sens pathologique du terme d’ailleurs. Ni trop ni pas assez « grand public », Night Call est un thriller qui peut convenir à tout le monde, n’y voyez pas une révolution ni même une vraie originalité, mais laissez-vous guider dans les nuits agitées de Los Angeles par le charismatique Lou Bloom… il ne vous laissera pas le choix de toute façon.

Note : 7.5/10

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